Il s’agit d’étendre la notion de mode
linéaire. En dynamique, les principaux avantages bien connus et très
utilisés sont les suivants : modes et fréquences propres résultent de
la résolution (théorique et numérique) d’un problème aux valeurs
propres (fréquences) et vecteurs propres (modes) qui permet de résoudre
simultanément la question des réponses oscillantes, des états
vibratoires (asymptotiques), de la stabilité et de l’instabilité, en
utilisant le découplage sur la base des modes du problème initial. On
utilise aussi abondamment la propriété de superposition des réponses de
chaque mode (synthèse modale). La théorie linéaire fournit des
discrétisations, des approximations maîtrisées : la réduction de
modèles est aussi bien comprise. Il est possible d’obtenir les réponses
vibratoires et également par le biais des mêmes outils théoriques de
procéder à l’identification des paramètres modaux et donc d’un modèle
d’une structure.
La notion de modes non linéaires, historiquement introduite par
Rosenberg [1], élargie ensuite via différentes approches (théorie de la
variété centrale, formes normales) a fait l’objet de nombreux travaux
[2-15, 94, 96] : ces références ne constituent qu’un tout petit extrait
de la littérature (Les références du texte reposent sur un parti pris :
fournir un extrait des travaux de membres du groupe, loin d’être
exhaustif). Il faut noter qu’historiquement les approches ont concerné
les systèmes à peu de degré de liberté et les méthodes très puissantes
sont de nature d’abord analytique plus que numériques. Un mode non
linéaire peut être vu comme une variété invariante (asymptotique) sur
laquelle s’effectuent les oscillations (les vibrations) du système non
linéaire considéré. L’invariance est associée à la résolution d’une
sorte de problème aux valeurs propres non linéaire. On comprend alors
aisément que certaines des propriétés des modes linéaires vont être
préservées (la réduction de modèle à la dimension de la variété ;
l’attractivité de la variété) mais que d’autres ne seront qu’au mieux
approchées (les résonances et les fréquences de résonance dépendent des
amplitudes; le nombre de modes peut être plus élevé que le nombre de
degrés de liberté ; la superposition des modes non linéaires est
impossible en général).
Les enjeux sont toutefois clairs : l’analogie entre les modes linéaires
et les modes non linéaires -au prix de développements existants ou à
mener- peut apporter au dynamicien des structures de nombreux avantages
des premiers : économie de calculs et modèles réduits, identification
de modèles sur un modèle de dimension réduite, synthèse rapide des
réponses, quantification de la stabilité / instabilité, convergence
asymptotique vers la variété, etc.
Les modes non linéaires ont potentiellement de nombreuses applications
aux problèmes d’évolution et aux nombreuses applications multi et pluri
disciplinaires associées.
Aujourd’hui, les problèmes ouverts concernent principalement :
- le perfectionnement des outils de calcul,
- le calcul des modes non linéaires pour des systèmes en grande
dimension, par exemple en élargissant les calculs menés par des
méthodes analytiques à des calculs numériques utilisant les
possibilités des codes de calculs usuels (éléments finis par exemple),
permettant le traitement de systèmes continus (plaques, coques, …), de
systèmes complexes,
- la gestion de non linéarités non régulières en petite ou grande
dimension,
- l’utilisation des modes pour la réduction de modèles en petite et
surtout grande dimension,
- l’élargissement des applications.
B. Cochelin, C. Touzé